ORGANE OFFICIEL DU COMITÉ CENTRAL DU PARTI COMMUNISTE CUBAIN

Le Secrétaire à l’Agriculture des États-Unis, Thomas Vilsack, a effectué une visite à Cuba, durant laquelle il a rencontré le vice-président du Conseil des ministres, Ricardo Cabrisas, le ministre des Relations extérieures, Bruno Rodriguez et le ministre de l’Agriculture, Gustavo Rodriguez. Il a également visité deux coopératives dans la province d’Artemisa et un marché agricole à La Havane

L’entretien avec Ricardo Cabrisas a porté sur les relations économiques extérieures de Cuba, les intérêts du secteur agricole des États-Unis, ainsi que sur les entraves au commerce entre les deux pays, découlant de l’application de la politique de blocus.

Le Secrétaire étasunien à l’Agriculture était accompagné par le Sénateur Jeff Merkley (démocrate pour l’Oregon) et les représentants démocrates Terri Sewell (Alabama), Kurt Schrader (Oregon) et Suzan DelBene (Washington), ainsi que par d’autres fonctionnaires du Département de l’agriculture et l’ambassadeur par intérim des États-Unis à La Havane, Jeffrey DeLaurentis.

Le Secrétaire à l’Agriculture du gouvernement d’Obama et le ministre des Relations extérieures, Bruno Rodriguez Parrilla, ont passé en revue l’état des relations bilatérales, notamment plusieurs points de l’agenda établi, comme la

coopération dans plusieurs domaines mutuellement avantageux, ainsi que plusieurs questions en suspens dont le blocus, qui constitue la principale entrave à une normalisation des relations entre les deux pays.

« Nous espérons très vivement entretenir une relation de travail positive avec Cuba. Nous pouvons travailler ensemble et coopérer dans une série de domaines », a signalé le Secrétaire d’État à l’Agriculture lors de sa rencontre avec son homologue cubain, Gustavo Rodriguez.

Il a ajouté que l’agriculture organique et l’expérience cubaine en matière de biotechnologie revêtent un intérêt spécial pour les États-Unis.

Plus loin, il a dit espérer avoir également des discussions sur la lutte contre les fléaux et les maladies, ainsi que sur les effets du changement climatique.

« Bien que les ventes de produits agricoles peuvent être considérées comme les pionnières du dégel des relations à partir d’un changement de la législation des États-Unis en 2000, les restrictions obligeant Cuba à payer d’avance et en liquide, le manque de crédits et l’interdiction d’exporter ses produits constituent un frein à l’évolution de ces relations dans le contexte actuel », a-t-il dit.

« Cette visite permettra aussi d’identifier des opportunités pour le jour où les deux pays pourront développer un commerce bilatéral de produits agricoles », a ajouté M. Vilsack.

À la différence du reste des secteurs où le président Barack Obama peut faire usage de ses facultés législatives, la responsabilité de la levée de ces barrières revient au Congrès de Washington.

D’où la mise en œuvre à l’organe législatif des États-Unis d’une série d’initiatives comme la Cuba Agricultural Exports Act (Loi pour l’exportation agricole à Cuba), présentée récemment par le congressiste républicain de l’Akansas, Rick Crawford.

Ce projet de loi permettrait l’octroi de crédits et l’accès des entreprises nord-américaines aux programmes du Département de l’agriculture. Par ailleurs, il favoriserait l’ouverture de l’île, quoique de manière limitée, aux investissements étrangers, pourvu qu’ils soient destinés au secteur privé.

Les principales organisations d’agriculteurs et d’éleveurs des États-Unis ont créé, au mois de janvier dernier, une coalition destinée à promouvoir ces changements et à lever les entraves à leur compétitivité sur un marché situé à environ 144 kilomètres seulement de leur territoire,

Lors d’une intervention au Congrès en décembre dernier, le Secrétaire à l’agriculture a estimé à 1,7 milliard de dollars le potentiel d’achat de Cuba, mais dans la pratique les dernières mesures du président Obama ont eu un impact peu significatif dans ce domaine.

Depuis 2001, Cuba a importé des produits agricoles des États-Unis pour une valeur de 5 milliards de dollars, ce qui s’explique par les prix compétitifs et la proximité des ports d’embarquement. Cependant, en 2014 les achats de l’entreprise d’État Alimport ont chuté à un peu plus de 291 millions de dollars, soit à moins de la moitié du pic de 2008 (710 millions).

L’Île s’est tournée vers d’autres marchés offrant des conditions financières plus favorables, en Amérique du Sud, en Europe et en Asie, même si ces marchés sont éloignés de milliers de kilomètres.

M. Vilsack est le troisième membre du cabinet de Barack Obama à se rendre à Cuba depuis le rétablissement des relations diplomatiques en juillet dernier, après le Secrétaire d’État John Kerry et la Secrétaire au commerce Penny Pritzker, au mois d’octobre. (SE)

LEVER LE BLOCUS EST UNE QUESTION DE BON SENS

Le secrétaire à l'Agriculture des États-Unis a déclaré à La Havane que lever les entraves qui empêchent le commerce entre son pays et Cuba est une question de « bon sens », et il s'est engagé à chercher les façons d'assouplir les mesures en vigueur.

« Nous devons travailler à identifier ces entraves, en les étudiant et en analysant quels types d’assouplissements mettre en place pour les déplacer ou pour le moins les diminuer », a affirmé Thomas Vilsack durant une conférence de presse à l'ambassade des États-Unis à La Havane.

Bien qu'une loi étasunienne, à la fin du gouvernement de William Clinton, ait autorisé la vente d'aliments à Cuba, la première fois datant de 2001, les chiffres ont diminué durant ces dernières années. Du niveau record de 710 millions d’achats enregistrés en 2008, l'année dernière, ce chiffre est tombé à 291 millions.

Environ un an après les annonces du 17 décembre dernier, les États-Unis continuent d’exiger le paiement anticipé et refusent l'accès aux crédits.

« Je me suis engagé à chercher des manières de réduire ces barrières. Certaines l’ont été, mais évidemment, il nous reste encore bien du travail. Mon engagement, c’est de voir ce que l’on peut faire à court terme. »

Vilsack a signalé les avantages de voyager accompagné de quatre membres du Congrès étasunien qui pourront raconter ce qu'ils ont vu à Cuba à leur retour à Washington.

Contrairement à d'autres secteurs où le président peut utiliser ses vastes pouvoirs exécutifs, les conditions de paiement des ventes agricoles ne peuvent être modifiées que par le Congrès.

INTÉRÊTS COMMUNS

Thomas Vilsack a confirmé que les principaux points de convergence se situent dans l'agriculture organique, la lutte contre le changement climatique et les infestations des cultures.

Le secrétaire à l'Agriculture s’est félicité de l’approche de Cuba, fondée sur l’utilisation de la science dans la lutte contre les maladies et autres ravageurs. Il a indiqué que les deux pays font face à des défis communs comme le HLB, une maladie qui affecte les agrumes dans chaque pays.

En outre, il s’est félicité de la stratégie cubaine face aux cas de grippe aviaire enregistrés aux États-Unis cette année. « Contrairement à d'autres pays qui ont décrété une interdiction totale du produit, Cuba a compris le problème et y a fait face de façon régionale, en surveillant État par État. Une attitude qui est celle des organisations internationales et qui est basée sur la science ».

Vilsack a visité le marché agricole de 19 et B dans la capitale où il a été impressionné par le fait que les légumes et les fruits qu’il y a vus venaient de centaines d'exploitations agricoles dispersée dans la ville. « L'agriculture urbaine est quelque chose que Cuba pratique depuis longtemps et les États-Unis veulent en savoir plus. »

Ensuite, il s’est entretenu avec les travailleurs de deux coopératives : la coopérative agricole Antero Regalado à Güira de Melena et d’élevage, Niceto Pérez à Artemisa. « Il est très clair que ce sont des personnes qui ont un amour profond pour la terre et pour le travail qu'elles effectuent pour les citoyens de leur pays. »

Thomas Vilsack a indiqué que le problème des machines agricoles, des systèmes d'irrigation et des intrants nécessaires à l’ensemencement et à la récolte, ainsi que l'impact du changement climatique figuraient parmi leurs les préoccupations des travailleurs agricoles des coopératives. Mais il s’est dit impressionné par leur niveau de créativité et d’innovation afin de maintenir leurs niveaux de production.

« Le commerce est un chemin à deux voies », a déclaré Vilsack, concernant l’avenir des relations entre les États-Unis et Cuba, un pays qui durant plusieurs années a acheté des produits étasuniens sans avoir la possibilité d'exporter les siens au plus grand marché du monde, situé seulement à 144 km de ses côtes.

Interrogé sur certaines déclarations du gouverneur de la Floride, Rick Scott, au sujet de l'impact d'une ouverture vers Cuba pour l'agriculture de cet État du sud, le Secrétaire du secteur a indiqué que tout le monde sortira gagnant si les changements sont structurés de façon correcte.

« Les consommateurs aux États-Unis souhaitent disposer d’une variété de produits toute l'année et les importations ont atteint des niveaux record ces dernières années », a-t-il dit.

Après avoir indiqué que le gouverneur n'était sans doute pas bien informé, Vilsack a plaisanté sur le fait que l’opinion qui l’intéressait le plus était celle de son chef, le Président. « Il estime qu'il faut lever l'embargo (blocus) et il incite le Congrès à franchir ce pas ».

À une question de Granma au sujet de savoir si le projet des États-Unis se réduisait à faire du commerce avec des producteurs privés ou s'ils avaient l’intention d’échanger avec l’ensemble des formes de propriété dans l'agriculture cubaine, le Secrétaire étasunien a déclaré : « Dans la mesure où l'embargo (blocus) sera levé et que nous commencerons à faire des affaires, il est évident que nous le ferons avec tous ceux qui ont des produits ».

« Les États-Unis ont des relations avec d'autres pays au système différent du leur. Ce sont des organisations internationales, comme l'Organisation mondiale du Commerce qui fixent les "règles du jeu" », a-t-il ajouté.

Il a indiqué que les préoccupations fondamentales en attendant le jour où le blocus sera levé, ce sont les questions zoosanitaire et phytosanitaires. Dans ce sens, il a reconnu que Cuba avait réalisé des efforts conséquents, ce que les États-Unis apprécient énormément.

« L’un de nos défis lorsque l'embargo (blocus) sera levé, c’est qu'un conteneur qui viendra avec des produits pour Cuba, reparte avec des produits cubains. C’est cela le bon sens. »