ORGANE OFFICIEL DU COMITÉ CENTRAL DU PARTI COMMUNISTE CUBAIN
Photo: Archivo

Le général de brigade Raul Diaz-Argüelles Garcia s’acquitta de la mission confiée à nos troupes par le commandant en chef Fidel Castro : sauver la République d’Angola. Et il le fit avec la même détermination dont il avait fait preuve 17 ans plus tôt, lorsqu’il s’arracha des mains de ses tortionnaires, au terme d’une évasion spectaculaire.

Le Héros de la République de Cuba et à l’époque commandant Raul Diaz-Argüelles, mourut le 11 décembre 1975, il y a 40 ans, lorsque son véhicule blindé, en tête d’un convoi, fut détruit par une mine anti-tank.

Le président Agostinho Neto avait demandé à Fidel de lui envoyer des instructeurs militaires pour aider à la formation des combattants angolais et répondre aux provocations des troupes sud-africaines et zaïroises, financées par les États-Unis, qui avaient commencé également à fournir du matériel de guerre au Front national de libération de l’Angola (FNLA), de Holden Roberto, installé dans le nord du pays, et à l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (UNITA), de Jonas Savimbi.

George Costello, chef des opérations de la Division Afrique de la CIA, informait son officier John Stockwell : « Nous avons commencé à structurer un programme pour appuyer Savimbi et Roberto… Nous disposons de 14 millions de dollars et nous avons envoyé quelques armes par voie aérienne. (1)

En avril 1975, emmenée par les jeunes officiers qui avaient assumé le pouvoir au Portugal, l’armée décidait de mettre un terme aux guerres coloniales en accordant l’indépendance aux colonies portugaises en Afrique, dont la Guinée-Bissau, le Mozambique et l’Angola avec sa riche enclave pétrolifère du Cabinda. La proclamation officielle de l'indépendance était prévue le 11 novembre de cette même année. On parlait de la formation d’un gouvernement tripartite.

Holden Roberto avait annoncé son intention de s’emparer de Luanda, la capitale, le 10 novembre, pour y chasser Neto, qui avait été nommé président, le MPLA étant le mouvement le plus représentatif, vaste et divers, et son programme reposait sur la lutte des classes, ce qui lui assura le soutien de nombreux groupes dans l’ensemble du pays

Les commandants Raul Diaz-Agüelles Garcia et Carlos Fernandez Gondin furent nommés respectivement chef et sous-chef de la mission dépêchée par Fidel.

En août 1975, les premières dizaines d’instructeurs cubains débarquaient en Angola. Au mois d’octobre, trois navires moyens arrivèrent avec le reste des membres de la première mission militaire cubaine en Angola. Le 4 novembre 1975, le gouvernement cubain décida de dépêcher des troupes spéciales. Le groupe d’instructeurs et leurs élèves angolais, le détachement des troupes spéciales et le feu précis et meurtrier des batteries de BM21 et autres armes s’avérèrent décisifs pour préserver l’indépendance de l’Angola.

LA LÉGENDE DU CHEF D’ACTION

Raul Diaz-Argüelles était génétiquement révolutionnaire et rebelle, à l’instar de ses parents, Raul et Marina, qui combattirent la dictature de Gerardo Machado, dans les années 30. « Il possédait ce pouvoir d’insuffler à ses compagnons sa combativité, sa détermination, sa volonté de bien faire et son enthousiasme. C’était un chef compétent, d’un courage à toute épreuve, un vrai camarade. On le retrouvait toujours à l’endroit où la situation était la plus critique. Nous avons ressenti un choc terrible et une grande tristesse en apprenant sa mort ». (2)

« Son image restera toujours présente. Il n’était pas facile de lui faire une observation, une mise en garde ou un rappel à l’ordre, tellement son caractère était fort. Il était très rigoureux et exigeant avec lui-même, et très sérieux dans son travail. Il défendait son opinion avec une conviction profonde et sincère ». (3)

Le jeune Raul part étudier un an à l'Université de La Havane. C'est là qu’il rejoint la FEU (Fédération étudiante universitaire) qui s'oppose de manière radicale à la dictature du Batista. À la Faculté d’ingénierie de l’Université de La Havane, il se lie aussitôt avec le leader José Antonio Echeverria, président de la Fédération des étudiants (FEU) et d’autres jeunes révolutionnaires comme Fructuoso Rodriguez, Juan Pedro Carbo Servia, José Machado, Faure Chomon et Tavo Machin, et il participe à des manifestations et autres mouvements de protestation.

À la suite de l’attaque du Palais présidentiel du dictateur Fulgencio Batista et l’assassinat du président de la FEU, il s’exile aux États-Unis et dépêche à Cuba un avion transportant une cargaison d’armes. Guillermo Jiménez est chargé de lui trouver un lieu sûr.

Il revient dans l’Île en tant que membre de l’expédition du Scapade organisée par le Directoire révolutionnaire, avec Faure Chomon à sa tête, qui débarque à Nuevitas. Il est aussitôt envoyé à La Havane avec d’autres camarades, dont Machin, Jiménez, Pepe Fernandez Cossio, Tony Castell et Carlos Figueredo. Dans la capitale, il remplace Eduardo Garcia Lavandero, le chef des actions du Directoire, assassiné par la dictature, et il forgera ensuite sa légende par des actions aussi héroïques que téméraires comme l’attentat contre Santiago Rey, ministre de l’Intérieur, et l’attaque de la 15e station de police, dans le quartier chic de Miramar, où une plaque commémorative perpétue aujourd’hui le souvenir.

UNE FUITE SPECTACULAIRE

Le 10 juillet 1958, il signe le plus spectaculaire de ses exploits. Ayant à ses trousses la police politique de Batista, il arrive au refuge du bâtiment situé à l’angle des rues B et 21, dans le quartier havanais du Vedado, ignorant qu’on venait d’y assassiner ses camarades José

« Tato » Rodriguez Vedo et Pedro Martinez Brito. Il trouve la porte entrebâillée mais, flairant du louche, il décide de courir en sens contraire jusqu’à une fenêtre donnant sur la rue contiguë.

Il glisse et tombe, ce qui le sauve d’une rafale de mitraillette. Il se redresse et saute dans le vide du troisième étage et atterrit sur un poulailler, ce qui amortit l’impact de la chute. Il s’en sortira avec une cheville fracturée.

Il regarde vers le haut et aperçoit l’homme à la mitraillette. Il sort son révolver, ouvre le feu et fait mouche. Les autres policiers n’osent pas se pencher au dehors, si bien qu’il en profite pour prendre la fuite.

On lui apprend qu’il est « grillé » à La Havane, et il est envoyé dans la Sierra de l’Escambray, dans les montagnes du centre du pays, où il est nommé commandant et prend part aux combats de Santa Clara avec le Directoire. Il sera gratifié par le Che de plusieurs décorations pour ses actions et sa bravoure.

Après le triomphe de la Révolution, il est nommé chef du DTI (service du renseignement), il fréquente l’école des officiers des Forces armées révolutionnaires et est nommé successivement chef d’information, d’artillerie, des opérations et de l’état-major dans plusieurs armées et troupes des FAR. En sa qualité de chef de la 10e direction des FAR, il est chargé de la coopération militaire avec d’autres pays.

En Afrique, Raul Diaz-Agüelles évoluera sous le pseudonyme portugais de

« Domingos da Silva ». Dans ce pays, il est chargé d'encadrer et d'entraîner les troupes du MPLA qui, après avoir lutté pour l'indépendance de l'Angola, doivent maintenant contrecarrer les attaques du FNLA et de l'UNITA. Le colonel da Silva s'illustre notamment à la bataille de Kifangondo, où l'armée du MPLA, appuyée par les soldats cubains, écrase les troupes fantoches. À Cabinda, le 8 novembre, les troupes de Mobutu lancèrent une attaque contre les Forces armées populaires d’Angola et 232 cubains, une action qui, le 12 du même mois, se solda par une cuisante défaite. Les troupes angolaises et cubaines passèrent à l’offensive et en quelques heures, les Zaïtois, les mercenaires et les soldats du Front de libération de l’enclave de Cabinda furent rejetés de l’autre côté de la frontière angolaise.

Les Sud-africains abandonnèrent leurs dernières positions dans le sud de l’Angola le 27 mars de l’année suivante. Grâce à cette situation favorable, le gouvernement du président Agostinho Neto et Cuba convinrent de réduire le personnel militaire cubain et de ne conserver que les instructeurs. Cependant, une nouvelle invasion sud-africaine retarda momentanément ce retrait.

L’effervescence suscitée par la victoire cubaine en Angola s’étendit au-delà des frontières de ce pays. Comme l’a signalé Nelson Mandela, la victoire cubaine « a brisé le mythe de l’invincibilité de l’oppresseur blanc… et a servi de source d’inspiration au peuple combattant d’Afrique du Sud ».

Et dans tous ces événements importants figure la mémoire de Diaz-Agüelles.

Lors de sa première visite en Angola en tant que président en 2009, Raul Castro se rendit au Cimetière Alto das Cruces de Luanda pour rendre hommage tous nos compatriotes tombés au champ d’honneur dans la défense de ce pays d’Afrique, y compris au général de brigade Raul Diaz-Argüelles Garcia, dont les restes ont été par la suite ramenés à Cuba.

(1) John Stockwell. Une histoire d’ennemis. Une histoire de la CIA.

(2) Coronel Gonzalo del Valle. Angola.Éditions Capitan San Luis.

(3) Commandant de la Révolution

Guillermo Garcia.

« L’épopée cubaine en Angola, aux débuts de laquelle prit par le commandant Diaz-Agüelles, brisa le mythe de l’invincibilité des oppresseurs blancs », devait déclarer Nelson Mandela