ORGANE OFFICIEL DU COMITÉ CENTRAL DU PARTI COMMUNISTE CUBAIN
Le Dr Pedro Valdés Sosa, sous-directeur du Centre de neurosciences de Cuba.

DE l’avis de nombre de scientifiques, nous vivons l’époque des Projets du cerveau. Il suffit de mentionner les budgets astronomiques que les pays développés dépensent pour tenter d’en savoir plus sur le fonctionnement de cet organe, le plus complexe de l’évolution, dont les mystères ont été jusqu’ici impénétrables à tous les efforts déployés par la science.

Ainsi, en Europe, aux États-Unis, au Japon, en Corée du Sud et au Canada, les scientifiques se livrent à une concurrence acharnée pour asseoir leur suprématie dans ce domaine, à l’instar de la course aux brevets en matière de technologie.

Pour les docteurs ès science Mitchell et Pedro Valdés Sosa, respectivement directeur et vice-directeur du Centre des neurosciences de Cuba (CNEURO), les justifications de telles dépenses avancées face aux contribuables sont pertinentes et axées dans deux directions.

« Du point de vue de la santé, le vieillissement démographique a entraîné un accroissement alarmant de la prévalence de maladies neurodégénératives. Il suffit de signaler que les démences et autres troubles cognitifs frappent 3% de la population de la planète, ce qui a poussé l’Organisation mondiale de la santé à les qualifier d’urgence internationale. Les Projets du cerveau ont pour but la compréhension et la guérison de ces troubles. »

Mais l’aspect économique constitue une motivation tout aussi importante. D’après ces chercheurs, l’Union européenne investit des millions d’euros dans la création d’une intelligence artificielle capable d’imiter le cerveau, notamment dans la construction d’ « ordinateurs neuromorphiques » plus rapides et plus proches du cerveau. L’objectif déclaré est de procurer à l’industrie européenne un avantage par rapport aux États-Unis. Pour sa part, ce pays travaille à la mise au point de technologies lui permettant de créer la « machine mentale », ainsi que de procédés novateurs capables d’enregistrer simultanément l’activité de milliers de neurones.

L’utilisation des neuro-images d’une résolution chaque fois plus élevée (cartographie cérébrale) et autres outils nanotechnologiques novateurs font partie des éléments essentiels de tous ces projets. À ceci s’ajoutent la mise au point de censeurs « wearables » qui mesurent le fonctionnement du cerveau, du cœur et d’autres organes tels des objets portables dont on se sert dans la vie quotidienne.

L’urgence de traiter l’énorme quantité d’informations générée par ces recherches a donné lieu à une nouvelle discipline, la neuroinformatique, qui est en fait un champ de recherche visant à l'organisation des données des neurosciences par l'application de modèles informatiques et d'outils analytiques. Cette discipline est le fruit de l’interrelation entre les sciences informatiques, les mathématiques, la physique et les neurosciences.

La Chine s’est consacrée sur le tard aux Projets du cerveau, mais grâce à un programme échelonné sur 20 ans, elle espère dépasser ses concurrents. Ce programme occupera la quatrième place pour ce qui est des financements alloués à la science et à la technique dans le géant asiatique pendant le prochain quinquennat.

Comme l’a fait remarquer à Granma le Dr Pedro Valdés Sosa, Cuba a été un des pionniers de la cartographie cérébrale avec le début des recherches en 1969 sur ordinateur de l’activité électrique du cerveau, un projet mené avec la CID-201, le premier ordinateur cubain à mémoire à tores de ferrite, et la création de l’appareil Medicid, une activité impulsée à l’initiative du commandant en chef Fidel Castro.

Ces travaux scientifiques permirent à notre pays de s’ouvrir sa propre voie dans le domaine de la tomographie électrique cérébrale. Ainsi, à partir des années 90 le Centre des sciences neurologique de Cuba fut chargé de la direction des projets de cartographie cérébrale, qui compte parmi ses principaux résultats d’avoir caractérisé la forme et les connexions cérébrales du cubain commun.

Aujourd’hui, cette institution développe des technologies pour le diagnostic précoce des démences et des ictus cérébraux à l’aide de technologies de pointe, dont un appareil de résonance magnétique à très haute résolution de 3 Tesla.

Grâce à ces résultats, Cuba est aujourd’hui reconnue comme l’un des pays à l’avant-garde de la cartographie cérébrale à l’échelle mondiale. Sa capacité à mettre les dernières recherches au service de la santé de ses citoyens est l’une des idées défendues par Fidel et qui a incité l’Organisation mondiale de la Santé à demander au CNEURO de codiriger la réunion « Les projets du cerveau et la santé globale », tenue à Genève au mois de juillet dernier.

UN REGARD À LA PSYCHOPHYSIOLOGIE

Les Projets du cerveau ont insufflé une nouvelle vie à une vieille spécialité connue sous le nom de psychophysiologie, la branche de la psychologie chargée de l’étude des bases cérébrales et corporelles de la pensée et des émotions. Autrement dit, l'étude des mécanismes physiologiques par lesquels s'accomplit le comportement de l'Homme

Parmi les thèmes importants traités figurent une meilleure compréhension des mécanismes neuraux dans les addictions, l’étude de la plasticité cérébrale durant le traitement neuropsychatrique, ainsi que l’effet du vieillissement sur le cerveau.

La psychophysiologie moderne, basée sur l’emploi du MEDICID, a été mise au point à Cuba par le Dr Mitchell Valdés. Son groupe de travail a obtenu des résultats scientifiques significatifs, comme déterminer la manière dont le cerveau codifie les concepts abstraits. Cette équipe a mené des projets destinés à la détection et au traitement des pertes de l’audition et des troubles de l’apprentissage. Il n’est donc pas surprenant que Cuba ait été choisie comme siège du 18e Congrès de l’Organisation internationale de psychophysiologuie (IOP2016), prévu du 31 août au 4 septembre à l’Hôtel Melia Habana.

Patronné par l’Organisation internationale de psychophysiologie (IOP), la Société cubaine de neurosciences et le Centre de sciences neurologiques de Cuba, cette rencontre réunira environ 370 spécialistes venus du Japon, de Chine, de France, du Canada, d’Italie, des États-Unis, du Mexique et du Brésil, entre autres pays.

À cet égard, le président de l’IOP, le professeur Giuseppe Chiarenza, a déclaré :

« Je me souviens avec une grande satisfaction de la réponse unanime lorsque j’ai proposé Cuba comme siège de cet événement. Le prestige scientifique du Centre de neurosciences de Cuba n’a pas son pareil en Amérique latine. »

Selon le Dr Mitchell Valdés Sosa, c’est le moment propice pour que la Grande Île des Antilles puisse s’impliquer à fond dans les Projets du cerveau et leur application, la neurotechnologie.

Comme elle l’a fait en figurant parmi les premiers pays à développer la biotechnologie, Cuba a devant elle une occasion unique de contribuer à l’économie nationale avec ses résultats dans l’étude du cerveau et, ce qui plus important, de contribuer à apaiser les souffrances des gens ayant été atteint d’un type de dommage cérébral et ne peuvent jouir pleinement de la vie.