Faire de nos villes un environnement accessible pour une personne âgée exige, au-delà des bonnes intentions, des modifications dans l’utilisation des lieux publics et des politiques conçues à cet effet.
La préoccupation à ce sujet des plus hautes instances du pays se reflète dans l’Orientation N° 144 de la Politique économique et sociale, adoptée en avril 2011 lors du 6e Congrès du Parti Communiste cubain, qui appelle à : « porter une attention particulière à l’étude et la mise en œuvre de stratégies dans tous les secteurs de la société pour faire face au vieillissement croissant de la population. »
Depuis l’année 2000, le pays inclut dans la Méthodologie d’élaboration des plans urbanistiques l’objectif de supprimer de façon progressive tous les obstacles architecturaux, en évitant d’en créer de nouveaux. Cette directive est accompagnée de contraintes techniques, juridiques et administratives pour assurer le contrôle des constructions, aussi bien de l’État que privées et elle a force de loi.
« Ces dispositions sont étroitement liées aux anciennes “Ordonnances de construction” en vigueur, qui jouèrent un rôle déterminant puisqu’elles ont servi de base à l’organisation de nos villes. Aujourd’hui, ces ordonnances sont devenues nos normes urbanistiques », signale la Dr Iris Menendez-Cuesta Gonzalez, sous-directrice de l‘Urbanisme à l’Institut de la Planification physique (IPF).
Même si les normes et les réglementations ont pour objectif de supprimer les obstacles tant en zones urbaines qu’au sein des bâtiments publics, certaines modifications dans les logements nuisent parfois à la mobilité des personnes.
Les exemples les plus communs sont les portes d’entrée des maisons et des garages qui ouvrent sur l’extérieur dans des zones où la façade de l’immeuble donne directement sur le trottoir. Mais il y en a d’autres.
La Dr Menendez-Cuesta Gonzalez explique qu’à l’intérieur des logements et des immeubles, il y a aussi des obstacles architecturaux. « Ce sont ceux qui existent dans les maisons. D’autres sortent de ce milieu et nuisent à tout le monde, à l’espace public. »
Plus loin, la spécialiste ajoute : « Nous avons de nombreuses barrières architecturales dans nos villes, depuis les poteaux électriques et de communications, jusqu’aux lampadaires publics. Ils ne devraient pas se trouver sur les trottoirs, car ils prennent trop de place. Il faudrait dégager les trottoirs, les passages piétons et de véhicules de tout élément qui les obstrue.
« Il arrive qu’en voulant retirer une barrière on en crée une autre. Par exemple : il y a beaucoup de rampes d’accès mal construites qui ont engendrées d’autres problèmes, car si elles facilitent le passage d’une chaise roulante, elles peuvent en même temps gêner le passage d’un aveugle », ajoute-t-elle.
En raison du vieillissement de la population, les constructions dans des espaces publics qui au départ n’étaient pas considérés comme des barrières architecturales peuvent devenir un obstacle pour une personne âgée. À ce sujet, la spécialiste de l’IPF précise.
« C’est la raison pour laquelle depuis quelques années nous avons commencé à intégrer cet élément non seulement dans la planification, mais aussi dans le projet architectural et urbanistique : supprimer ce genre d’obstacles.
« Voilà pourquoi la Norme d’accessibilité à l’environnement physique prévoit que chaque projet de construction à fonctions publiques doit disposer de rampes d’accès. Elle comporte les éléments à respecter quant à l’inclinaison de la rampe et la protection de la personne qui va y accéder, en plus des types de sols antidérapants. »
LES ESPACES DES PERSONNES ÂGÉES
Les statistiques du Centre d’études de la population et du développement montrent une croissance de plus de 400 000 individus dans la population de personnes âgées à Cuba entre la première et la seconde décennie du 21e siècle.
La même source indique que cette catégorie de plus de 60 ans vit principalement dans des grandes villes, de sorte que le vieillissement en milieu urbain est supérieur à celui en milieu rural.
D’où le fait que la mise en œuvre de stratégies visant à supprimer tout élément physique empêchant une bonne circulation dans tout espace, qu’il soit collectif ou privé, ait été prioritaire dans les grandes villes et montre déjà des résultats.
« Des progrès ont été réalisés, notamment dans les bâtiments publics : hôpitaux, centres culturels et de loisirs, qui ont supprimé les obstacles dès la construction même du bâtiment », souligne la Dr Iris Menendez Cuesta.
Les bâtiments conçus pour le tourisme répondent également à ces normes. « Dans tous les systèmes d’hébergement, les obstacles ont été éliminés, car cela était exigé dès la conception du projet et dans l’exécution de l’ouvrage. Néanmoins, il reste encore beaucoup à faire, surtout dans les zones urbaines » conclut la spécialiste de l’IPF.
GAGNER EN CULTURE
Selon l’Étude sur le vieillissement de la population, à partir du recensement de la population et des logements de 2012, Cuba est l’un des pays au plus haut taux de vieillissement démographique de la région.
Ce phénomène présente des particularités : d’une part, du point de vue statistique, il est comparable avec celui des pays les plus développées et, d’autre part, cela s’est passé en moins de 50 ans, plutôt rapidement si l’on sait qu’en Europe il a fallu attendre deux siècles pour atteindre un taux de vieillissement élevé.
Cette nouvelle réalité représente un véritable défi à l’heure d’élaborer les plans d’aménagement urbanistique, car les villes les plus importantes du pays ont été fondées il y a environ 500 ans et n’ont pas été conçues en fonction d’une population âgée comme celle qui les habite aujourd’hui.
La volonté de l’État de faciliter la mobilité et l’accessibilité urbaine dans les lieux publics et les espaces verts ne se limite pas aux règlementations urbanistiques ni aux villes. Peu à peu, elle s’étend à des espaces conçus pour accueillir aussi bien les jeux des enfants et des adolescents que les moments de détente des personnes âgées.








