ORGANE OFFICIEL DU COMITÉ CENTRAL DU PARTI COMMUNISTE CUBAIN

• Les circonstances changent, mais pas les principes. La Cuba de 2022 n'est pas la même que celle d'il y a deux ans, mais son essence, ce que nous sommes et ce que nous voulons être, ne peut pas être dévoyé quels que soient les obstacles, les imprévus, les pressions externes (le blocus et la guerre économique, commerciale et financière ne sont pas de la fiction) et les insuffisances internes auxquelles nous sommes confrontés. Et une part importante de ce que nous sommes et de ce que nous nous proposons d’être a trait à la vie culturelle et à la politique qui favorise et dirige les processus qui stimulent sa vitalité.
Dans une édition précédente, le collègue de Cienfuegos Julio Martinez Molina, en traitant dans un reportage la polémique et pour beaucoup le projet irritant des propriétaires d'un restaurant de faire payer un prix exorbitant pour la prestation d'un duo de musique urbaine, a laissé une fenêtre ouverte à la réflexion en faisant appel à « la nécessité d'une meilleure cohérence entre les transformations économiques et l'application de la politique culturelle ».
Passons sur l'événement qui a donné lieu à cet article. S'agissant de cohérence, il convient de souligner que les principes de base de la politique culturelle restent inchangés. Ni par décret ni par imposition, mais parce qu'ils se fondent sur des traditions et des conquêtes profondément ancrées dans notre devenir, et sur des aspirations et des projections irrévocables intimement articulées avec le programme révolutionnaire d'émancipation, de décolonisation, de désaliénation et de dignité des êtres humains.
Les variables passent par l'interprétation et l'application de la politique et la capacité de ses gestionnaires et de ses acteurs à l'assumer de manière créative et responsable, sans dogmes ni dérapages, comme ceux qui l’ont plus d'une fois détourné de son cours.
Si les principes de la politique incluent la reconnaissance du rôle de la culture dans la promotion et l'orientation des processus socio-économiques, il conviendra d’explorer en même temps la manière dont les processus socio-économiques influencent et parfois même déterminent la qualité de la culture.
Avant même que les nouveaux acteurs économiques n’aient commencé à opérer dans la société cubaine – en fait, avant même l’approbation des micro, petites et moyennes entreprises (mpme) et le développement des coopératives non agricoles, dans le dialogue entre les institutions culturelles et les organisations de créateurs (Uneac et ahs), la question des relations entre la production et la circulation des biens culturels et le secteur non étatique de l'économie (comme les discothèques, les boîtes de nuit, les studios d'enregistrement, les galeries d'art, les imprimeries et tout autre espace ou service ayant un impact sur l'activité) a été à l’ordre du jour plus d'une fois.
Indépendamment des progrès, qui existent, et des questions en suspens, beaucoup plus nombreuses que souhaitées, ce qui est ressorti clairement des deux côtés, c'est que la politique culturelle est indivisible. On ne saurait concevoir une politique culturelle fragmentée, morcelée, manipulée sur la base d'intérêts segmentés. Cela ne s'applique pas seulement au secteur non étatique, mais à tous les secteurs. Il n'est pas rare d'observer, au sein des institutions culturelles, des médias et des espaces touristiques et publics, de regrettables discordances entre la politique et la réalité.
Dans le domaine de la musique, pour se limiter à un domaine dans lequel se décide une grande partie de ce que nous venons d’exposer, la cohérence entre la politique et la pratique sociale passe par la reformulation structurelle et fonctionnelle de l'organisation et de la gestion de ses acteurs et de ses productions, ce qui a été trop longtemps ajourné et qui a été réclamé par les délégués du 9e Congrès de l'Uneac, et signalé lors de la clôture de cette rencontre par le président de la République, Miguel Diaz-Canel Bermudez.
Un autre des défis les plus urgents en matière de gestion culturelle est orienté vers la formation du personnel de gestion au niveau territorial, plus précisément au niveau municipal, étant donné l'importance que cette instance occupe déjà dans la vie économique et sociale de la nation. Une formation qui ne doit pas être limitée au cadre directement lié à la culture, mais à tous les cadres de la municipalité. Une formation qui ne peut pas être étrangère à la sensibilisation et à la prise de conscience du rôle de la culture.
La Première conférence du Parti communiste cubain a eu lieu il y a dix ans. Il convient de rappeler le contenu de deux de ses objectifs (58 et 59), qui énoncent la consolidation de la politique culturelle de la Révolution, définie par Fidel dès 1961 dans ses Paroles aux intellectuels, caractérisée par la démocratisation de l'accès à la culture dans un climat d'unité et de liberté, et l'exclusion des approches mercantiles ou de nature différente qui dénaturent la politique culturelle. Au-delà de la lettre, nous devrons toujours trouver la meilleure façon de révéler l'esprit d’objectifs aussi actuels.