ORGANE OFFICIEL DU COMITÉ CENTRAL DU PARTI COMMUNISTE CUBAIN
De nombreuses mains et de nombreux efforts se sont conjugués pour accélérer le redressement. Photo: Jose M. Correa

Ils ne vont pas me berner. Ils ne pourront pas berner le peuple cubain, qui sait faire la différence entre une personne préoccupée, privée des informations nécessaires, tourmentée par la longue coupure d’électricité (chaleur, perte de nourriture, petits enfants à la maison) et ceux qui tentent de profiter de leur état d'esprit, pour les retourner contre eux-mêmes, c'est-à-dire contre le projet social qui les protège.
Je me trouvais, le samedi 1er octobre, entre les rues Linea et F. Cela ressemblait à un rassemblement spontané de citoyens qui exigeaient de l’action – il est vrai qu'il existe des bureaucrates qui entravent la communication et n’agissent pas en fonction des besoins du peuple, mais plutôt en fonction d'indications signées et tamponnées (un responsable d'une entreprise, par exemple, a refusé de prêter la grue garée dans sa cour pour déplacer quelques troncs d’arbres [arrachés par l’ouragan] dans le quartier où il habite) –, mais j'y ai vu aussi quelque chose de différent.
Une certaine presse étrangère, chargée de construire l'image dont l'impérialisme a besoin, avait été convoquée. Un signe qui éveillait les soupçons, car elle n’a pas coutume d’assister aux authentiques actes de manifestation contre les agressions impériales ou contre les méfaits.
Aux abords du rassemblement, le dialogue était possible : les gens exprimaient leurs besoins ou leurs insatisfactions. Mais d'autres le refusaient et renversaient des poubelles sur la chaussée. Les caméras se concentraient sur eux. Et là, sans tarder, la véritable motivation de ce groupe est apparue : nous sommes contre le système, contre le gouvernement.
Lorsqu'ils ont commencé à crier le mot « liberté », dans l'abstrait, selon les règles d’action de la guerre de basse intensité, le rassemblement s'est physiquement divisé : derrière les plus nombreux, déconcertés et immobiles, ceux qui venaient exiger le prompt rétablissement de l'électricité. Les manipulateurs accomplissaient minablement leur mission : politiser le mécontentement devant les caméras.
NE M’EMBOBINE PAS,
DONNE-MOI DU COURANT
Les réseaux sociaux, volontairement irréfléchis et superficiels, gérés depuis Miami (avec leurs relais à Cuba), court-circuitent la communication : ils remplissent le cyberespace de mensonges et d'explications absurdes, et intoxiquent les moins informés. « Ne les laisse pas t’embobiner, qu’ils mettent l’électricité ! », lancent-ils. En d'autres termes, n'écoute pas les explications, n'accepte pas les arguments rationnels.
Si vous rompez la communication, le dialogue, vous entravez la solution, vous limitez la participation populaire. De nombreuses personnes se sont trompées de chemin : « si tu fais un scandale, ils vont résoudre ton problème ! »
Je me souviens d'un cas concret : dans un quartier de la capitale, dès les premières heures du samedi matin, les brigades des Espaces verts ont élagué les arbres tombés et les branches qui gênaient puis, avec l’Entreprise des communaux, elles ont envoyé des camions, des grues et des bulldozers pour ramasser les décombres.
Sur place, « à pied d’œuvre », se trouvaient, comme il se doit, des représentants du Parti et du gouvernement. Chez certains d'entre eux, il y n'avait pas non plus ni électricité ni eau, et y compris avec des enfants et des personnes alitées.
Ce travail était indispensable pour que les monteurs de lignes puissent intervenir plus tard. Cela s’est terminé tardivement. Certains habitants du quartier ont apporté leur aide, d'autres ont distribué du café et de l'eau. Mais un petit groupe est resté à part, à observer.
Lorsque les ouvriers et les fonctionnaires sont partis, ils ont demandé à quelle heure, exactement, l'électricité serait rétablie. Les électriciens se trouvaient déjà dans des quartiers proches du lieu, mais il n'était ni prudent ni honnête de donner une heure : ils savaient qu’ils travaillaient sans répit. C’est alors que, ignorant l'explication et les efforts réalisés, ils ont menacé de descendre dans la rue pour manifester. Certaines de ces personnes se trouvaient dans les rues Linea et F plus tard. Mais cette nuit-là, comme cela avait été prévu auparavant, comme cela avait été expliqué, le courant a été rétabli.
LORSQUE FIDEL ÉTAIT LÀ,
CELA N'ARRIVAIT PAS...
Chaque message a un destinataire spécifique. Pour les hommes et les femmes qui ont donné leur vie à la Révolution, la figure de Fidel est sacrée. Mais cette affirmation est une construction de laboratoire pour confondre, diviser et entraver la continuité du processus révolutionnaire.
Je me souviens de la façon dont l’on exaltait la figure de Lénine dans les premières années de la Perestroïka, et comment on cessa de le mentionner par la suite, pour plus tard démolir ses statues. Ou comment les ennemis de Chavez ont commencé à faire son éloge et à le comparer aux nouveaux dirigeants peu après sa mort.
Le véritable objectif – même si certains révolutionnaires insatisfaits ont naïvement adopté l'expression – est de disqualifier la direction actuelle de la Révolution et de nier la possibilité d'une continuité des objectifs. Cette technique du manuel a pour nom : « assassinat de la personnalité », et elle est appliquée aux principaux dirigeants, pour les empêcher de se connecter aux masses.
Non seulement Fidel n'est pas reproductible (c’était, comme ses amis et ses ennemis le savent, un génie), mais les circonstances historiques le sont aussi. Néanmoins, cette nouvelle direction, formée avec Fidel et Raul, est profondément adepte de Marti et de Fidel.
UN GOUVERNEMENT RÉPRESSIF,
UN ÉTAT EN FAILLITE
Manifester n'est pas un délit, mais obstruer la voie publique et renverser des poubelles l'est. La police se rend sur place, mais c'est le peuple qui discute face à face avec ceux qui tentent de politiser le mécontentement, de l'utiliser à leurs propres fins.
Oui, c’est le peuple qui vient sur place et défend la Révolution – avec plus de légitimité que ceux qui la dénigrent, car ils représentent la majorité des Cubains –qu'ils occupent ou non des fonctions publiques.
La plupart des révolutionnaires qui m'ont accompagné ont subi des coupures d'eau et d'électricité jusqu'au dernier jour. Ceux qui reçoivent de l'argent des groupes contre-révolutionnaires, sont-ils le peuple, peuvent-ils se présenter comme des défenseurs du peuple ?
Il n’y a pas d’un côté le gouvernement, les institutions, et de l’autre le peuple. Ce schéma ne fait que tenter de masquer la véritable contradiction : d'un côté, ceux qui vivent aux dépens du peuple et le manipulent à des fins personnelles, et de l'autre, ceux qui défendent le système de justice sociale qui donnera toujours la priorité au bien-être collectif.
Répression ? Puisque vous naviguez sur les réseaux sociaux, ne voyez-vous pas la signification de ce mot aux États-Unis, en Europe, en Amérique latine ? « Ce qui se passe dans les autres pays ne m’intéresse pas, seul le mien m’intéresse », a répondu, furieux, un jeune homme qui parlait de liberté, mais il n’a pas su expliquer ce que ce mot signifiait lorsque je le lui ai demandé.
Il est inacceptable de passer outre ses propres déficiences pour parler des maux d’autrui, mais il est bon de rappeler à ceux qui veulent un changement de « système » ce qui se passe dans la Mecque du capitalisme.
Parce qu'ils veulent nous faire croire que Cuba est un État en faillite, alors que ce fut le seul pays d'Amérique latine à avoir créé ses propres vaccins contre la covid-19 et à avoir immunisé toute sa population, y compris avec des cycles de rappel, malgré le blocus ; le seul pays dans l'Histoire à avoir réussi à résister pendant plus de 60 ans à un blocus criminel qui vise précisément à faire en sorte que les gens s’épuisent et préfèrent le retour des dominateurs, et le seul pays où un ouragan tellement destructeur n’a réussi à ôter la vie qu’à trois citoyens, parce que sa Défense civile parvient toujours à évacuer les habitants les plus exposés.
Et aussi malheureux que cela puisse être, il faut le dire : le décompte des victimes mortelles en Floride après le passage de l'ouragan Ian se poursuit (le bilan dépassant déjà les 100 morts), et Joe Biden, le président du pays le plus riche du monde, a déclaré qu'« il faudra des années pour réparer les dégâts causés par l'ouragan ».
Un article publié dans le New York Times du 23 septembre fait référence à Porto Rico – une colonie des États-Unis – en ces termes : « Au cours de l'année écoulée, les pannes d'électricité, qui peuvent parfois durer plusieurs jours, font désormais partie de notre vie quotidienne (...) Pourtant, malgré ce service de très mauvaise qualité, les factures d'électricité ont doublé. »
C'est pour cela qu’ils sont déterminés à détruire ce qui nous sauve : l'unité du peuple et de ses institutions, qui s'est manifestée lors de la pandémie de covid-19, à l'hôtel Saratoga, ou lors de l'incendie des réservoirs de pétrole à Matanzas.
Et cette unité est possible parce que ce ne sont pas des camps opposés, parce que les institutions de la Révolution appartiennent au peuple et existent pour le peuple.