
Le gouvernement cubain a présenté un ensemble de décisions destinées à créer un « environnement commercial plus dynamique » pour les investissements étrangers, dans le cadre du Programme de gouvernement visant à corriger les distorsions et à relancer l’économie.
Les mesures, qui se traduiront prochainement par de nouvelles réglementations, comprennent une plus grande souplesse monétaire, la simplification des formalités, l’accélération des délais et de nouvelles modalités d’opération, dans le but d’accroître la production nationale et les recettes extérieures.
Lors du 8e Forum sur les Investissements, qui s’est tenu dans le cadre de la 41e Foire internationale de La Havane, Oscar Pérez-Oliva Fraga, vice-Premier ministre et ministre du Commerce extérieur et des Investissements étrangers, a indiqué que dans le contexte de la mise en œuvre du Programme de gouvernement visant la stabilisation macroéconomique, les autorités cubaines confirment leur engagement en faveur des investissements étrangers en tant que «composant fondamental pour leur développement économique et social ».
L’objectif déclaré est que toutes les formes de gestion dans l’économie – État, investissements étrangers et acteurs non étatiques – fonctionnent « harmonieusement » et soient orientées vers les objectifs de développement national.
Dans le paysage commercial actuel, 376 entreprises à capitaux étrangers de 40 pays opèrent à Cuba. En 2025, et malgré le blocus accru, 32 nouvelles entreprises ont été approuvées avec un capital engagé de 2,1 milliards de dollars.
PRINCIPALES MESURES
Souplesse monétaire et opérationnelle :
Dualité monétaire : mise en place d’un schéma permettant aux investisseurs d’opérer en monnaie nationale et en devises de manière flexible, selon leurs besoins.
À propos des devises : Les investisseurs étrangers seront incités à concentrer leurs efforts sur l’obtention de recettes extérieures, soit par des exportations, soit par la vente à des segments de l’économie cubaine qui paieront en devises.
Tarifs en devises : dans certains secteurs, des tarifs en devises seront fixés pour les biens et services, avec une approche « plus compétitive et proche de la réalité ».
Comptes à l’étranger : Les entreprises auront la possibilité d’ouvrir des comptes bancaires à l’étranger afin de faciliter leurs opérations et d’atténuer les effets du blocus.
Simplification et accélération des formalités et des procédures :
Plan d’affaires plutôt qu’Étude de faisabilité : suppression de l’exigence de présenter une étude de faisabilité, qui est remplacée par la présentation d’un Plan d’affaires, ce dernier étant une projection des attentes de l’investisseur, chiffrées avec la proposition d’investissement.
Réduction des délais : le temps d’évaluation d’une entreprise par la Commission correspondante est réduit de 15 à sept jours.
Silence positif : si un organisme d’État ne répond pas dans le délai imparti, il sera appliqué le critère de « silence positif », c’est-à-dire que le plan sera considéré comme approuvé.
Flexibilité de la documentation : Les documents constitutifs requis sont simplifiés, et ne sont conservés que les essentiels.
Validité des évaluations : Elle s’étend sur plus d’un an, et accélère les processus de transmission des droits.
Nouveaux modes d’investissement et de fonctionnement
Location d’installations hôtelières : Les entreprises étrangères remportant un appel d’offres pour la location d’un hôtel seront automatiquement établies en tant qu’entreprise à capital entièrement étranger, ce qui accélérera leur démarrage.
Réactivité des actifs inutilisés : les investisseurs ont la possibilité d’opérer des actifs cubains sous-utilisés (installations de production, zones) afin d’investir et de réaliser des bénéfices, avec une réversion future à l’État.
Commercialisation en gros : Il est confirmé que tout investisseur étranger peut commercialiser ses produits et ses services en gros à tout acteur économique cubain ayant capacité de paiement, sans restrictions.
Accès au carburant : Les entreprises étrangères pourront acheter du carburant en devises sans restrictions de plan. S’il n’y a pas de disponibilité, ils seront autorisés à l’importer directement.
Flexibilité du travail et secteur financier
Recrutement : L’organisme employeur participe à la sélection, mais la décision finale de recrutement est prise par l’investisseur, soit directement, soit par l’intermédiaire de l’organisme employeur.
Gratifications en devises : Validation de la possibilité de verser des gratifications en devises aux travailleurs au titre des bénéfices, par des paiements bancaires et à condition que l’entreprise génère des revenus externes.
Banque à capital étranger : La participation de capitaux étrangers dans le secteur bancaire et financier national est activement encouragée.
Zones spéciales : La création de zones spéciales (pas nécessairement à l’échelle de Mariel) pour des activités spécifiques telles que l’immobilier ou des parcs technologiques, avec des régimes spéciaux reste à l’ordre du jour.
Nouvelles modalités financières et immobilières
Opérations de swap sélectives : Il a été décidé de mettre en œuvre, de manière sélective, des opérations de swap, c’est-à-dire d’échange de dettes, dans le but d’ordonner des obligations et d’obtenir des revenus en devises ou l’accès à des sources de financement.
Le vice-Premier ministre a précisé : « il ne s’agit pas de faire des opérations de swap uniquement pour rembourser une dette », mais elles doivent être liées à des affaires durables, qui génèrent en toute sécurité des revenus en devises.
Secteur immobilier : Promotion d’un nouveau modèle, dans lequel la partie étrangère fournit le financement nécessaire à l’exécution des investissements dans des projets résidentiels. Ces entreprises doivent être autosuffisantes en devises et respecter les exigences de protection du patrimoine, d’efficience énergétique et d’utilisation des sources d’énergie renouvelables.
SECTEURS STRATÉGIQUES : ALIMENTATION ET ÉCONOMIE DE LA CONNAISSANCE
Pérez-Oliva a réitéré l’approche prioritaire dans deux secteurs clés pour le développement de Cuba, le premier étant la production d’aliments, où sont promues « de nouvelles modalités d’affaires plus flexibles et plus simples pour générer une augmentation rapide de la production ».
Il a cité en exemple les entreprises vietnamiennes de production de riz. Le message est clair, a-t-il dit : «toute entreprise axée sur la production d’aliments sera évaluée de manière positive».
Comme deuxième secteur clé, il a mentionné l’économie de la connaissance. Compte tenu de la main-d’œuvre qualifiée, les partenariats sont encouragés dans des secteurs tels que l’informatique, la biotechnologie et l’industrie pharmaceutique, où, a-t-il dit : « nous avons beaucoup de professionnels qualifiés à Cuba avec la capacité de générer des connaissances. »
À propos du cadre juridique, le vice-Premier ministre a souligné qu’«aucune de ces propositions n’est en contradiction avec la Constitution de la République de Cuba, les Orientations et la Conceptualisation. Ce sont des décisions, a-t-il dit, qui, « selon ce schéma, peuvent être réalisées sans aucune difficulté».
Quant aux Cubains résidents à l’étranger qui souhaitent investir dans leur pays, il a ratifié que « toutes ces questions sont applicables tacitement » ; les Cubains qui résident à l’étranger et souhaitent investir, peuvent le faire sans aucune différence, ni entrave.
Pour compléter les mesures d’assouplissement annoncées, le ministre a présenté une mise à jour du portefeuille qui comprend 426 projets.
Ce dernier a une approche sectorielle, principalement axée sur la production d’aliments, l’industrie, le tourisme et l’énergie, cette dernière étant particulièrement axée sur la prospection et l’extraction pétrolières.
Les projets sont répartis dans toutes les provinces du pays, 38 d’entre eux étant des initiatives locales. Sur l’ensemble du portefeuille, un groupe de 83 projets prioritaires a été sélectionné en fonction de leur potentiel d’exportation.
QUELQUES PRÉCISIONS
Yanet Vazquez Valdés, vice-ministre du Commerce extérieur et des Investissements étrangers, a précisé à la presse qu’en matière de recrutement de main-d’œuvre, les investisseurs étrangers auront la possibilité de demander, de manière exceptionnelle et au cas par cas, le recrutement direct de leurs employés. Cependant, le processus de sélection par les organismes employeurs autorisés par l’État reste la règle générale.
En outre, elle a ajouté que l’expérience acquise au cours de cette année servira à définir le cadre définitif dans la nouvelle Loi sur les investissements étrangers.
À partir de ces règles, un nouveau cadre juridique sera élaboré, qui permettra le partenariat entre des entreprises d’État cubaines et le secteur non étatique.
Cette mesure permettra également de renforcer les possibilités de l’entreprise d’État, de récupérer les capacités installées et de les combiner avec les potentialités du secteur privé, un secteur qui a commencé à se développer ces dernières années et qui occupe une place importante dans le tissu des entreprises.
À propos des opérations de swap – d’échange de dettes –, elle a expliqué que, combinées à la projection de nouvelles affaires et à l’expansion d’entreprises qui sont déjà présentes dans l’économie cubaine, Il est prévu de trouver la possibilité de régler les dettes accumulées par l’Île, du fait de l’insuffisance des devises.
Par conséquent, a-t-elle précisé, un swap de dette traditionnel ne s’appliquera pas, précisant que : « nous n’échangerons pas des actifs contre des dettes, mais nous offrirons la possibilité de négocier des actifs, des contrats à moyen et long terme qui contribueront à la croissance économique et qui, en même temps, nous permettront de réduire ou d’éliminer les dettes envers certaines entreprises étrangères. »








